La règle d'or. Quel joli concept ! Ce débat, ouvert voilà déjà plus d'un an, propose de constitutionnaliser ce qui ne relève pourtant pas d'un enjeu constitutionnel. La loi fondamentale, en effet, n'a pas à définir le contenu des politiques. Même si nous l'admettions, la règle ne serait de toute facon pas de marbre. Depuis le traité de Maastricht, que sont devenues les normes d'alors, ces nombres d'or qui fixaient niveau de déficit et de dette publique. Ils ont explosé. L'obligation européenne, loin d'être constitutionnelle, s'en imposait pourtant pas moins aux lois des États. Comme quoi, en réalité, les cadres juridiques aussi contraignants soient-ils ne résistent pas à la décision politique lorsque l'imposent les circonstances. Cela reste vrai pour la "règle d'or" promise aujourd'hui... mais pour demain : une règle qui ne règle rien.
Cela dit, il faut souligner que la crise actuelle a la particularité de redonner à la politique budgétaire une place déterminante comme instrument macroéconomique essentiel dans un contexte ou tous les autres instruments ont atteint leur limite. On peut l'analyser comme une pression insupportable des marchés sur les États. Mais il n'est pas dit que cette pression soit si univoque que cela au point de réclamer une rigueur synonyme de récession. Il me semble en effet que la règle d'or est moins une demande des marchés que le cheval de Troie d'une politique budgétaire libérale.
Le déficit permanent n'est ni de gauche, ni de droite. Il relève de choix, ou de non choix ! Préférons-nous des prélèvements obligatoires faibles et moins de dépenses publiques ou bien plutôt des recettes fiscales plus fortes et mieux reparties et des dépenses publiques qui tirent l'investissement. Keynes est souvent convoqué. Mais s'il défendait l'idée de déficits en cas de récession, il n'en attendait pas moins un retour a l'equilibre budgetaire après. Alors que la cour des comptes vient de confirmer que la crise n'est responsable que de 38 % du déficit public, la politique du gouvernement a bien une responsabilité directe dans nos difficultés. La plus grave, a mon sens, est d'avoir assèché toute marge budgétaire de précaution nécessaire aux périodes difficiles au nom d'une politique favorisant l'épargne qui ne consomme pas et la rente qui n'investit pas.
Bonjour.
RépondreSupprimerUne petite précision d'un juriste à l'attention de l'économiste que vous êtes.
Sur l'affirmation que la loi fondamentale n'a pas à définir le contenu des politiques, cela me semble juste au plan politique (la Constitution ne doit être effectivement qu'un cadre) mais rien ne permet de l'étayer au plan juridique: le critère de la nature d'une règle est en droit français formel et non matériel c'est-à-dire que la valeur d'une règle dépend des formes dans lesquelles elle a été adoptée (une loi constitutionnelle est adoptée en la forme d'une loi constitutionnelle prévue à l'art. 89 de la Const.). Le critère n'est pas matériel en ce sens que la valeur d'une règle ne dépend pas de son contenu.
Ainsi par exemple, la parité a été inscrite dans la Constitution mais c'est aussi un choix politique dont on pourrait aussi imaginer, matériellement, qu'il relève de la loi ordinaire.
De même, le fait d'organiser un référendum pour l'entrée d'un nouvel Etat dans l'UE est un choix politique qui a pourtant été inscrit dans la Constitution.
Cordialement,
DF