La lutte des classes est-elle soluble dans le détail d'un coefficient ? C'est ce que m'inspire la tribune publiée par mon ami et collègue Gabriel Colletis dans Le Monde du 28 janvier 2012. A travers les querelles de chiffres et modélisations trompeuses, le fondement des dissensus n'est jamais très loin de l'idéologie. Cette dernière est même d'autant plus présente, et pressante, qu'elle se pare en règle générale d'une imparable vertu scientifique. Je sais G. Colletis proche de cette analyse. Variables diverses et constantes pas moins intangibles viennent alors nourrir l'objectivité mathématique du propos.
Vous connaissez la formule si souvent inscrite dans l'affichage d'une conviction à établir : "c'est une vérité mathématique de constater que...". Nous voilà donc aujourd'hui confrontés à une question draconienne : Quel est le véritable taux du multiplicateur keynesien dont va dépendre l'efficacité d'une politique budgétaire ou encore la place d'un curseur entre relance, rigueur et austérité ?
Ou est la source de cette doxa introuvable ? Au FMI, à l'OFCE, à l'OCDE, au MIT, dans le panier du consommateur, dans le portefeuille de l'épargnant ? Après débat, beaucoup conclueront prudemment : "ça dépend...". "les multiplicateurs peuvent être plus ou moins élevés au cours du temps et d'une économie à l'autre" (Alan Auerbach et Yuriy Gorodnichenko).
Nous voilà bien embarrassés. Cet indélébile marqueur, ultime témoin d'une politique libérale ou d'une politique progressiste, s'avère aussi fragile que les certitudes d'hier sur l'appropriation collective des moyens de production ou les vertus éternelles de l'Etat providence permissifs .
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