mardi 27 novembre 2018

Faire comme si... et advienne que pourra



Intervention au Conseil de Métropole à propos de la soutenabilité financière de la politique transport

En mars puis en septembre 2017, nous avons eu droit à des « exercices de prospective » financière du Plan de Déplacement Urbain et de la troisième ligne de métro. Notre inquiétude était déjà là.
En septembre 2018, nous avons droit désormais à une « étude de soutenabilité » confectionnée avec l’appui de vos consultants.
En septembre 2019, peut-être aurons-nous enfin «  l’arbitrage de la faisabilité » !

A quelle hauteur d’engagement de dépenses et d’irréversibilité sommes-nous aujourd’hui sur la TAE ? je me pose la question.

Nous avons une programmation des investissements sur la métropole qui dérape.
Nous avons un coût de la 3ème ligne de métro qui s’accroit.
Nous avons une contrainte sur nos dépenses de fonctionnement qui se resserre, ce dont vous vous félicitez après avoir signé cet engagement avec l’Etat.

Bref, c’est aujourd’hui l’ensemble de l’équilibre de nos politiques qu’il faut revisiter.

C’est alors que vous sortez les crayons de couleur, que vous scénarisez de beaux tableaux excel chiffrés, que vous redistribuez les variables pour qu’au final, telle une chatte tombant d’un toit brûlant, vous puissiez retomber sur vos pieds et rassurer le bon peuple.

J’ai donc fait l’exercice de comparaison entre toutes ces études. Et bien vous proposez aujourd’hui d’étudier la soutenabilité de votre plan de financement en faisant comme si… et advienne que pourra…

On va faire comme si les recettes commerciales de Tisseo passaient de 17 à 25 % des produits de gestion, c’est-à-dire qu’on ajoute une pincée de 15 M€ de plus par rapport à la recette initiale prévue dans la précédente prospective. (193 M€ contre 178 M€).
C’est une première historique : la couverture des coûts d’exploitation serait de 50 % contre 34 % aujourd’hui. Sans augmenter les tarifs, qui peut le croire ?

On va faire comme si les charges d’exploitation du réseau n’étaient plus envisagées à 395 M€ mais à 385 M€ en 2030, c’est-à-dire qu’on retire une pincée de 10 M€ par rapport à la prévision initiale. (alors même que le contrat de service public prévoyait de les encadrer, elles seraient de 276 M€ en 2021 et non de 265 M€ comme prévus). Sans toucher à la qualité de desserte ou au mode gestion public, qui peut croire à une telle maitrise des charges ?

On va faire comme si le Versement Transport allait miraculeusement connaitre un quasi doublement de son produit à la fin de la période, c’est-à-dire qu’on rajoute une grosse louche de 48 M€ de ressources supplémentaires par rapport aux précédentes projections. Pour la première fois dans l’histoire, sa progression serait plus dynamique que celle des subventions d’exploitation.

On va faire comme si le déficit d’exploitation initialement projeté à 216 M€, et qui était donc trop salé en Septembre dernier, allait être ramené à 192 M€. Sans toucher au développement de l'offre kilométrique de tous les autres modes (Bus...), qui peut croire à une amélioration de 24 M€ de ce ratio ? 

Comme malgré tous ces ingrédients, l’épargne nette du syndicat risque de frôler le zéro, on invente un nouveau concept. Il y avait celui de l’épargne nette. On a désormais celui de la « super épargne nette » que l’on atteint grâce à 678 M€ de subventions, comme si les tiers financeurs devenaient en quelque sorte les contributeurs d’épargne.

Et enfin, on va faire comme si la contribution de la collectivité passait de 24 à 16 % des produits, passant de 180 à 122 M€, c’est à dire qu’on retire une belle poignée de millions d’euros de l'effort prévu par Toulouse Métropole pour répondre au contrat signé avec l'Etat. Abracadabra !!

Telle est la variable autour de laquelle il fallait ajuster toutes les autres. L’enjeu est de rentrer dans les nouveaux clous de la maitrise des dépenses sur laquelle vous vous êtes engagé avec le premier ministre. A vrai dire, plus vous tentez de nous rassurer, plus notre inquiétude s'accroit.

L'eau Veolia

Au moment ou la Métropole de Toulouse s'apprête à confier la gestion de l'eau à Veolia, voila ce que nous dit le représentant de cette entreprise : "La différence, c'est que, quand vous êtes en régie, vous roupillez car vous n'êtes pas remis en cause." (...) "L'efficacité, la capacité d'innovation, de gestion ne sont pas les mêmes. La différence, c'est être en permanence en compétition."
Surtout quand l'égalité des conditions de la compétition ne sont pas réunies.

Je suis content d'apprendre que le service public roupille. Les régies de la Métropole Lilloise, 1er acteur national certifié ISO 45001, de Nice, de Grenoble, de Montpellier, seront contentes de l'apprendre alors même que la part de la gestion publique de l'eau potable a progressé de 10% en 15 ans.
 

Quelle indécence ! Quelle suffisance au moment même ou Toulouse Métropole s'apprête d'ailleurs à conserver et assurer plus de 70 % des investissements.

Plutôt perdre face à la régie que face à un concurrent privé. Voilà ce que nous dit Veolia. Révélateur. Il est des secteurs ou la concurrence rime avec oligopole et concentration. Ceux qui permettent justement de roupiller entre soi. De gagner l'assainissement de Bordeaux, de le perdre à Toulouse pour 2 centimes et de développer ses marges à l'international. Bref, d'autres payent pour nous.
En 2017, + 3.9 % du chiffre d'affaire avec une croissance près de 10 % dans le monde mais un recul de 0.1 % en France, une hausse de 5 % des dividendes et un renforcement considérable de l'agressivité commerciale.

Voilà ce que reflète le prix Veolia. Ce qu'on appelle une stratégie de marché pariant notamment sur une hausse de la consommation, qui est l'une des règles d'or de l'équilibre de ses contrats.